Allaiter votre bébé : le début d’une histoire d’amour? Le choix d’allaiter votre enfant est libre et respectable. Ce choix est profondément personnel, il vient du fond de vous : il est digne d’admiration. L’allaitement réjouit à la fois l’enfant et sa mère. Invariablement il attire les critiques et les remarques déplaisantes des passants honnêtes dont le regard oblique vous rappellera la chanson de Brassens. « Ton lait est insuffisant ou mauvais ! » « Tu t’y prends mal ! » « Tu devrais compléter et sevrer ! »… Nul n’a le droit de critiquer ainsi une mère qui allaite, ni de la déstabiliser par des remarques perverses. C’est pourtant le lot quotidien de toutes les mamans.
Il vous faut donc défendre à la fois votre bébé et votre allaitement, comme vous protégez la prunelle de vos yeux et votre propre intimité. Car la vie personnelle d’une maman avec son bébé doit garder envers et contre tous, ses secrets et sa liberté. C’est aussi pourquoi on ne peut jeter la pierre à celle qui ne peut allaiter. Le geste le plus rassurant pour votre nouveau-né s’inscrit dans la courbure de votre bras, qui l’enveloppe et le contient. Car il redoute le vide, l’instabilité et la solitude, préférant s’appuyer contre vous. Si vos bras n’y suffisent plus, vous lui proposerez calmement votre sein.

La croisière dure au moins deux mois… Mais elle est exceptionnelle dans la vie de votre petit et dans la vôtre, irrattrapable, unique. Votre disponibilité douce fondera son bonheur de vivre et le vôtre. Faire connaissance, allaiter et aimer son enfant demande un peu de temps et de patience. Comme des amoureux il faut se voir, se parler et se regarder de près. De grands peintres ont tenté de représenter ce temps de fragilité et d’émotions que vivent mère et enfant, sous le regard étonné et désappointé de l’entourage. Ce dernier ne s’aperçoit pas toujours du côté magique et mystérieux de ce temps-là. Cette réussite admirable inspire trop souvent jalousie et sarcasmes.
C’est si facile de briser et de casser les sentiments des autres. La jeune mère du tableau a le regard un peu las, mêlé d’étonnement et de sollicitude. Elle semble à l’écoute de ce qu’elle ressent conjointement avec son petit enfant, elle tente d’imaginer sa nouvelle vie et petit à petit elle retrouve les gestes dictés par ses sentiments les plus anciens, les gestes précieux d’une mère. Une nouvelle histoire commence à s’écrire, une nouvelle vie fragile à défendre.
Docteur Alain Brochard, pédiatre