Nous autres pédiatres, voyons grandir les enfants, filles et garçons. Et les années passent.
Puis un jour, c’est la pré adolescence. S’installent peu à peu une pudeur, une gêne quand il faut se déshabiller, se laisser examiner. Cela est plus facile quand on vient chez le même pédiatre depuis la naissance, la confiance est là.
Nous faisons également en sorte de respecter cette pudeur, cette appropriation de son corps que nous avons vue grandir et veillons à mettre l’adolescent à l’aise.
Mais pour l’examen gynécologique, l’orientation se fera vers un ou une spécialiste.
Cependant pour les filles va se poser à un moment donné cette question: quand dois-je aller pour la première fois voir un ou une gynécologue?
Cette première consultation demandera du temps, de l’expérience. Souvent, elles choisiront le même praticien qu’une copine. Parfois celui de leur mère.
Il est important de leur expliquer ce qu’est le secret professionnel, ça va les rassurer. De plus, c’est gratuit pour les mineures.
Si la maman l’accompagne, la consultation se passera sans sa présence, c’est essentiel. Même si la jeune fille atteste que la présence de sa maman ne la dérange pas. C’est le praticien qui demandera de lui-même à la maman de sortir quelque temps. L’adolescente appréciera que cela ne vienne pas d’elle, c’est une sorte de « première ».
C’est alors que la parole peut se libérer. Nous agissons tous ainsi dans nos cabinets avec les adolescents, ils sont heureux de l’entendre.
Ne pas être intrusif
Bien sûr, lors du premier « contact », du premier interrogatoire, il faudra peu à peu, en confiance, poser quelques questions à l’adolescente. Fume-t-elle (car si elle vient pour une contraception, il faut s’assurer qu’elle ne fume pas, même si le tabac n’est une contre-indication de la contraception orale qu’après 35 ans). Le faire avec doigté, pas comme le font les parents, en lui garantissant le secret.
De même savoir si ses cycles sont réguliers, comment comprend-elle le fonctionnement de son corps.
A-t-elle eu déjà un premier rapport. Passé le cap du « rougissement », elle se sentira à l’aise et comprendra vite pourquoi le médecin pose ces questions.
En général, quand il y a une demande (ou une acceptation) d’une consultation gynécologique pour une adolescente, c’est qu’il s’est déjà passé quelque chose. Ou bientôt.
Pour la mettre à l’aise, un premier examen gynécologique peut tout à fait être remis à plus tard, pour lui laisser le temps de « digérer » cette nouveauté.
La pilule
Notre rôle de praticien est de bien expliquer comment ça marche, quels sont les avantages et les inconvénients, la gestion du calendrier menstruel, la notion de prévention dans le domaine des infections qui peuvent se transmettre sexuellement. Le rôle des préservatifs. Comment les utiliser aussi en cas d’oubli et en cas de contraception de « rattrapage », la notion d’échappement ovulatoire.
Nous évoquons toujours la double protection pilule/préservatif. Ce que nous rappelons alors:
- La pilule contre les grossesses, à un âge d’hyperfertilité (maximale jusqu’à 25 ans) en rappelant qu’une grossesse est possible même sans pénétration et que le taux d’échec du préservatif peut atteindre 20 % des cas chez les jeunes filles.
- – L’usage au long cours du préservatif contre les infections sexuellement transmissibles, en particulier les infections à Chlamydiae, qui sont en augmentation depuis l’abandon relatif du préservatif. En cas de sexualité régulière non protégée, un prélèvement peut être réalisé au cours de la consultation pour faire une recherche de Chlamydiae par PCR (c’est une technique de laboratoire simple et fiable).
- Mais il n’est pas nécessaire de faire un frottis avant l’âge de 25 ans.
La vaccination contre le papillomavirus:
La consultation est aussi l’occasion de parler de la vaccination contre le papillomavirus si elle n’a pas été faite antérieurement avec les autres rappels vaccinaux (nous en parlons dans nos cabinets de pédiatrie et en général les jeunes filles acceptent bien cette vaccination, ainsi que leurs parents, vers l’âge de 11-12 ans, à condition que l’information soit bien passée). Nous lui expliquons que ce n’est pas un vaccin qu’on envisage pour une grossesse ultérieure, comme c’est le cas pour la rubéole, mais qui est pratiqué à son âge, car la réponse immunitaire est meilleure.
Il est bien sûr impossible de tout dire lors de la première consultation et il est, de ce fait, important de se projeter dans un rendez-vous ultérieur, qui doit être prévu dans un délai de 1 à 3 mois. L’objectif est que la jeune fille ait confiance en son médecin et n’arrête pas la pilule de façon prématurée.
Une première consultation réalisée dans de bonnes conditions, ce qui demande du temps et une formation, permet d’instaurer une relation de confiance avec la jeune fille et d’éviter un certain nombre d’IVG qui, pour moitié, sont liées à une contraception mal adaptée.