Mode de vie?
On le sait désormais, l’obésité, en particulier chez nos enfants, est un fléau de notre société de consommation et la conséquence d’un mode de vie mal adapté: voiture et bus qui nous évitent de marcher, canapé pour jouer pendant des heures en mangeant des chips, petit déjeuner mal pris à l’arrache surtout pour les adolescents, dîners surchargés, car c’est devenu le moment convivial de la journée, donc on y mange trop, beaucoup trop et après…on se couche: rien de tel pour faire du gras!
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Part de la génétique
L’obésité infantile, définie par un excès de masse grasse, résulte d’un déséquilibre de la balance énergétique. Ses causes sont multiples et intriquées et impliquent toujours une prédisposition génétique en interaction avec un environnement favorisant (mode de vie, manque de sommeil, etc.). Elle est considérée comme une véritable maladie des centres régulateurs du poids dont la forte héritabilité génétique peut atteindre jusqu’à 90 % dans les populations développant une obésité sévère et précoce (avant l’âge de 6 ans).
Le diagnostic précoce des obésités généti- ques est crucial car il permet de proposer une prise en charge spécifique adaptée et le cas échéant de nouvelles thérapeutiques médicamenteuses.
Surpoids et obésité chez l’enfant : vers une prise en charge globale et multidimensionnelle- La HAS s’engage, livret à disposition
Dans le cadre de la stratégie de transformation du système de santé « Ma santé 2022 » et en lien avec la feuille de route interministérielle sur l’obésité (2019-2022), la Haute autorité de santé (HAS) publie un guide pour optimiser le parcours de soins de l’enfant et de l’adolescent en situation de surpoids ou d’obésité et accompagner les professionnels de santé dans sa mise en œuvre. La HAS rappelle l’importance de la mesure de l’indice de masse corporelle (IMC), point de départ du dépistage du surpoids et de l’obésité, et détaille les autres aspects à prendre en compte et sur lesquels mobiliser différents professionnels tout au long d’un parcours de soins qui doit être coordonné, gradué et inscrit dans la durée pour être efficace.
Maladie chronique complexe, l’obésité peut entraîner dès l’enfance, des difficultés respiratoires, des troubles musculosquelettiques, un risque accru de fractures ou encore une hypertension artérielle. Les enfants et adolescents en situation de surpoids ou d’obésité sont généralement moins épanouis, ont une moins bonne image de leur corps, sont plus souvent harcelés et peuvent avoir de moins bons résultats scolaires. En raison des possibles conséquences psychologiques et sociales, l’optimisation du parcours de soins et d’accompagnement du surpoids et de l’obésité constitue un véritable enjeu de santé publique.
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Et le sport dans tout ça?
On n’a jamais autant vu les gens courir. Les adultes, oui, qui tiennent à leur ligne, car il faut être beau, entrer dans les canons de ce qu’on voit à la télé, se prendre en photo pour s’étaler sur FB ou Insta ou TikTok. La culture du « moi », mais le jeune là-dedans, pas sûr qu’il s’y retrouve. Sport, oui bien sûr, mais un enfant en surpoids voire obèse, ca ne va trop lui parler. Sinon, il n’en serait pas là. Donc avec tact et mesure.
Donc le grignotage, une catastrophe. Et nos jeunes qui parfois passent une ou deux heures chez eux, seuls, livrés à eux-mêmes avant que leurs parents ne rentrent au domicile: rien de tel pour « allumer » le poste et dénicher dans le frigo le truc qui va avec: glaces, bonbons, etc.).
Lors des consultations pour surcharge pondérale ou obésité d’un enfant, je suis parfois stupéfait de voir que les parents ont souvent la réponse en eux, mais ne se rendent pas compte qu’ils font tout…pour tenter leur enfant: accès aux tablettes, aux jeux tard le soir, confort devant la TV, ascenseur plutôt que l’escalier, pizzas, hamburgers, régime déséquilibré, etc.
L’enfant est souvent le reflet de ce qui se passe à la maison.
Cependant, l’obésité n’est pas toujours due à la mal bouffe. Il y a aussi les gènes qui parlent, les perturbateurs endocriniens, des causes psychiques (pandémie covid, divorce, décès, violence intra familiale, etc.)
Le poids des mots
Les jeunes qui sont taquinés, ridiculisés ou discriminés à propos de leur poids accusent une augmentation de leur masse corporelle qui peut atteindre 33% par an, par rapport aux enfants en surpoids qui ne sont pas mis à l’index pour leur poids. Des résultats qui contredisent l’efficacité de réflexions visant à motiver les jeunes à modifier leur mode de vie pour perdre du poids. Cette étude menée par une équipe du NIH/Eunice Kennedy Shriver National Institute of Child Health and Human Development (NICHD), qui confirme une stratégie d’encouragement plutôt que critique, est à lire dans la revue Pediatric Obesity.
La moitié des enfants en surpoids ou obèses ayant bénéficié des actions du programme « Vivons en forme (VIF) » ont amélioré leur statut pondéral. C’est ce que révèle une étude (1) publiée en juillet 2020 dans la revue internationale BMC Public Health
Des études menées en Angleterre sur 5 000 paires d’enfants jumeaux ont montré que l’héritabilité de l’obésité et de l’adiposité est de 70 %. De même, l’appétit se transmet de façon génétique, avec une héritabilité de 60 à 80 %
Désordres psychologiques
Ils peuvent s’ajouter: rythme scolaire pas adapté, besoin de performer pour faire plaisir aux parents, familles recomposées, parents séparés, histoires familiales, etc.
Nous donnons en tant que pédiatres, les meilleurs conseils possibles, mais nous savons d’avance qu’ils ne seront pas toujours suivis par l’enfant s’il n’adhère pas et se demande bien pourquoi on lui tourne autour à cause de ça (à partir de 12 ans, ce sera difficile pour lui, il va commencer à en souffrir, ses camarades vont se moquer de lui, il ne voudra plus aller à la piscine, cherchera à mettre des vêtements amples pour cacher (ça se verra encore plus, mais lui ne le sait pas), etc.
Il faut réagir à temps. Les parents doivent adopter la bonne conduite qui aidera l’enfant. Servir d’exemple et là tout se complique. Renoncer à sa propre bière le soir devant la TV? Aller au travail à pied? Réduire les portions le soir? Peu sont disposés à le faire et la plupart du temps, soit le père, soit la mère sont à peu près convaincus, mais pas toujours les deux en même temps. Mais ça ne marche pas si la règle n’est pas la même pour tout le monde.
Naturellement, j’exclus dans cet article les enfants qui ont un problème de surpoids lié à une pathologie particulière (endocrinienne par exemple, ce qui est rare chez les enfants).
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Pas égaux en terme de métabolisme
Nous savons que chacun d’entre nous n’a pas le même métabolisme et c’est ce qu’il faut arriver à faire comprendre à l’enfant ou à l’adolescent, qui va trouver « injuste » de devoir faire attention, alors que son frère s’empiffre sans avoir de surpoids.
Difficile.
L’alimentation à elle seule n’explique pas tout. L’obésité de l’enfant et de l’adolescent est une pathologie. C’est une maladie constitutionnelle, une perturbation des centres de régulation du poids en grande partie génétiquement déterminée.
L’obésité de l’enfant n’est pas celle de l’adulte
Quelques fausses idées
– Le sur-risque cardiovasculaire ? (risque de faire un infarctus, une hypertension): Il n’existe pas à court terme en pédiatrie. À long terme, seul compte l’état à l’âge adulte, peu importe si l’enfant était ou non obèse. C’est une donnée nouvelle.
– Les examens complémentaires à faire ? : inutiles la plupart du temps, sauf si le pédiatre suspecte une atteinte endocrinienne, mais c’est rare. Les troubles thyroïdiens sont exceptionnels chez les enfants.
– Le besoin d’un traitement? : L’obésité régresse spontanément chez 50 % des enfants obèses de moins de 6 ans. Si l’enfant ou l’adolescent n’est pas demandeur, tout régime est voué à l’échec. Mais attention, le problème c’est surtout au-delà de 7 à 8 ans: elle va s’installer et gare à la puberté qui va suivre après, de plus en plus difficile.
– Le risque de baisse puis de reprise de poids : Lorsque l’adulte obèse se relâche après un régime, il risque de dépasser son poids d’avant régime. (on le voit avec les régimes protéinés). L’enfant obèse, surtout avant 8-9 ans, ne fait pas le lien entre son alimentation et son poids. Nous savons par expérience qu’il va bien écouter tous les bons conseils du pédiatre lors de la consultation, mais sorti de là, il va réclamer sa pizza.
Que faire ?
L’accompagnement doit être fait de manière optimale, avec les bonnes personnes. Ne jamais le gronder, ne pas supprimer inutilement des aliments, il faut peu à peu qu’il adhère au projet. Pour nous pédiatres, celà implique souvent de le revoir de manière rapprochée, lui parler le même langage, s’intéresser à ce qu’il fait, même les jeux. Ne pas le culpabiliser. Pour l’entourage, c’est pareil, au sein de la famille, montrer qu’on s’intéresse à lui, qu’on va partager des activités avec lui, même des jeux vidéos. Ces derniers sont souvent le reflet d’un mal-être (si c’est trop souvent) et le jeune en surpoids va chercher à s’indentifier aux personnages musclés et beaux fabriqués par les marchands de jeux.
Il faut établir un petit programme avec des objectifs simples, progressifs. La conduite à tenir n’est naturellement pas la même à tenir chez un garçon de 8 ans que chez une fille de 12 ans. Adapter. Éviter les forums. Remontrer le jeune en surpoids de manière régulière au professionnel de santé, seul s’il le faut. Qu’il y ait un contrat de confiance entre lui et SON docteur.
Dédramatiser
Si le jeune commence à être convaincu que perdre du poids est un bon objectif, lui donner des pistes: prendre des assiettes de plus petites tailles (le simple fait de réduire la taille de l’assiette réduit le seuil de satiété), diminuer les portions, surtout le soir, ne pas se resservir, éviter les desserts qui n’apportent pas grand-chose. Mieux vaut sortir de table le soir en ayant un peu faim, quitte à boire en famille une tasse de thé un peu plus tard (tisane) autour d’un jeu.
L’aider à cibler ses habitudes de vie pour les modifier avec lui: durée canapé, durée jeux, durée effort, faire une partie du trajet-école à pied, etc.
Augmenter les rations de viandes blanches, de poissons maigres (pas de saumon, pas de thon).
En clair, pour chaque jeune, adapter ce qui doit être fait. Le pédiatre l’aidera. Le conseil d’une diététicienne aussi sera souhaité, à condition là aussi qu’il adhère.
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