L’enfant asthmatique en milieu scolaire

L’asthme concerne en moyenne un enfant scolarisé sur dix. L’absentéisme scolaire est fréquent. témoin du mauvais contrôle de la maladie asthmatique. Ce mauvais contrôle est d’autant plus net que le milieu scolaire nest pas indemne des habituels facteurs favorisant ou aggravant l’asthme. Ainsi, le risque allergique ait contact des phanères d’animaux véhiculés par les autres enfants, on la pratique régulière des cours d’éducation physique et sportive, sont autant de situations à risque pour l’enfant asthmatique scolarisé. Stabiliser l’asthme, informer l’école et dialoguer avec les enseignants, notamment par la mise en place d’un projet d’accueil individualisé (PAl), devraient éviter tin absentéisme responsable d’un pourcentage de retard scolaire élevé et de difficultés à plus long ternie d’orientation professionnelle.
L’asthme, maladie chronique la plus fréquente en pédiatrie, touche entre 7 et 1O % de la population scolaire, soit deux à trois enfants par classe. En moyenne, un enfant passe un tiers de son temps en milieu scolaire, et tant la maladie que l’environnement scolaire peuvent mettre le jeune asthmatique en situation d’échec. Les principaux problèmes rencontrés sont l’absentéisme et le retard scolaire, le risque allergénique de l’école, la pratique du sport et l’orientation professionnelle. La mise en place du projet d’accueil individualisé (PAI) permet d’aider à l’intégration de l’enfant asthmatique à l’école.
1. Absentéisme et retard scolaire
L’asthme reste une pathologie dont la prise en charge est malheureusement déficiente. La très récente étude AIRE [I] démontre que seuls 5,8 % des enfants asthmatiques de sept pays européens, dont la France, ont un asthme parfaitement contrôlé. Ainsi, en raison de leur asthme, près de 30 % des enfants voient leur sommeil perturbé plus d’une fois par semaine, la moitié présente une crise d’asthme dans le mois précédant l’enquête, un tiers a une limitation de l’activité sportive, et 42,7 % (52 % en France!) manquent l’école au moins une fois par an. L’absentéisme est même souvent plus important dans d’autres études, de l’ordre de 5 % du temps total d’école, voire 20 % pour un peu plus d’un asthmatique sur dix. Un asthme mal équilibré, donc symptomatique, responsable d’absentéisme, favorise l’apparition du retard scolaire. Un retard de I à 3 ans concerne 30 % des enfants asthmatiques tout venant. Il augmente au fil des années pour atteindre 54%au collège et 61% an lycée. En cas d’hospitalisation pour crise d’asthme, ce retard touche 63 % des enfants. Négligé ou accepté, un tel retard scolaire sera responsable d’une orientation professionnelle trop précoce, souvent inadaptée chez l’enfant asthmatique. débonchant vers des métiers manuels, bien plus pourvoyeurs d’asthme professionnel que d’autres professions.
2. Risque allergénique de l’école
Le risque allergénique est réel en milieu scolaire, même s’il est globalement moindre qu’à domicile. On retrouve, dans la poussière de salle de classe, des allergènes de blatte, acariens, chat, chien et souris. Ainsi, le risque pour un enfant d’avoir un test cutané positif aux phanères de chat. alors qu’il n’a pas de contact habituel avec un chat, est directement proportionnel an nombre «élèves qui, dans sa classe, possèdent un chat à domicile. L’allergène est retrouvé sur les vêtements. en particulier en laine, des élèves possédant un chat, mais aussi sur leurs bureaux et chaises de classe, on encore sur les rideaux de celle-ci ou les tapis. Si un élève présente un asthme allergique au chat, son risque de crise d’asthme est multiplié par 9 si sa classe est composée d’au moins quatre on cinq possesseurs de chats. Le risque allergénique est parfois plus visible, avec présence d’animaux, dont l’intérêt éducatif reste à déterminer, dans la classe. Il peut y avoir aussi des contacts allergéniques plus particuliers lors de classes vertes ou de sorties de fin d’année, qui ne sont en tout cas sûrement pas à contre-indiquer, sauf situation très à risque. Enfin, l’école émet des polluants, toxiques pour l’asthmatique, comme le formaldéhyde. notamment retrouvé pour ce dernier dans les écoles les plus neuves. Le tabagisme passif ne devrait pas être un souci car le tabac est normalement interdit à l’école, y compris dans les lieux découverts fréquentés par les élèves (loi Evin du 10janvier 1999).
3. Facteurs psychologiques
L’asthme n’est pas une maladie psychosomatique, mais certains facteurs psychologiques, comme l’appréhension de la rentrée scolaire, peuventjouer un rôle dans la survenue de crises d’asthme à l’école.
4. Pratique du sport
La pratique sportive, longtemps interdite ou déconseillée chez l’enfant asthmatique. est maintenant une thérapeutique, avec à la fois des bénéfices physiologiques et psychologiques. L’enfant entraîné physiquement verra son «essoufflement» ou dyspnée d’effort diminuer, la fréquence de ses crises d’asthme d’effort diminuer, sa socialisation au sein des camarades de son âge s’améliorer progressivement, et avec sa qualité de vie d’enfant. Plus encore, le sport est un moyen efficace d’aborder avec l’enfant la prise en charge globale de sa maladie asthmatique « Pour jouer au foot avec ses copains, l’enfant n’oubliera pas son traitement de fond».
Aider l’enfant asthmatique à participer au cours d’éducation physique et sportive (EPS). c’est avant tout l’aider à affronter son asthme. Les dispenses sportives, sauf cas particulier, ne devraient plus être rédigées pour asthme il faut en revanche conseiller l’enfant asthmatique pour réussir une pratique sportive en toute sécurité.

Sur le plan physiopathologique, l’enfant asthmatique présente à l’exercice deux types de symptômes :

  • un asthme d’effort. La crise d’asthme d’effort survient à l’arrêt de l’exercice, elle est la traduction clinique d’un bronchospasme. Pendant l’effort. les voies aériennes se refroidissent et se déshydratent, de façon d’autant plus importante que l’environnement est sec et froid et l’intensité de l’exercice élevée, générant un grand débit ventilatoire. À l’arrêt de l’effort, le réchauffement et la réhydratation brutale de ces mêmes voies aériennes, provoque la liberation de médiateurs (dont les leucotriènes), entraînant à la fois la contraction du muscle bronchique et un oedème local, c’est le bronchospasme induit par l’exercice.
  • une dyspnée d’effort ou essoufflement anormal, qui témoigne à la fois de l’hyperventilation d’effort caractéristique d’un niveau de débit ventilatoire trop élevé pour l’intensité de l’effort requis (hyperventilation) et d’un déconditionnement physique secondaire au manque d’activité physique, fréquent chez l’asthmatique.

Le sport est une thérapeutique. En effet, l’entraînement physique va permettre une diminution de l’hyperventilation d’effort, une majoration de la bronchodilatation pendant l’effort (effet protecteur par anticipation de la bronchoconstrietion post-effort) et un reconditionnement physique. L’enfant verra diminuer l’intensité et la fréquence de son asthme d’effort, diminuer sa dyspnée d’effort. Il vivra avec moins d’anxiété la crise d’asthme, aura moins recours aux bronchodilatateurs de secours.

Pour sécuriser la pratique sportive, différents moyens sont à la disposition du médecin et de l’enfant :

  • tout d’abord, ne pas hésiter à dire à l’école que l’enfant est asthmatique. Le certificat médical ou le PAT facilitent la collaboration avec l’enseignant d’EPS
  • vérifier le bon équilibre de l’asthme (traitement de fond, fonction respiratoire…),
  • prescrire un bronchodilatateur de secours pour traiter une éventuelle crise d’asthme d’effort, traitement que l’enfant doit toujours avoir à sa disposition,
  • prescrire si nécessaire an traitement préventif de l’asthme d’effort, habituellement un , de courte durée d’action qui sera pris 15 min avant le début de la séance sportive. Mais adapter le traitement de fond en ajoutant un antileucotriène ou un beta2 de longue durée d’action peut également être envisagé.

Si l’enfant participe à des compétitions, il faut savoir que tous les médicaments, à l’exception des antileucotriènes, des corticoïdes inhalés, des cromones et des anticholinergiques, sont considérés comme des substances dopantes. Ainsi, les beta2-agonistes de courte ou de longue durée peuvent être prescrits, à doses thérapeutiques, mais l’enfant doit en informer les responsables de la compétition avant le début de celle-ci le médecin quant à lui aura fait la preuve de l’asthme de l’enfant (test de réversibilité aux beta2 positif ou test d’hyper-réractivité bronchique spécifique ou non spécifique positif).

Pour sécuriser la pratique sportive, différents moyens sont également à la disposition de l’enseignant d’EPS et de l’enfant :

  • le début et la fin des exercices doivent être progressifs. L’échauffement général par des exercices respiratoires contribue à la maîtrise du souffle. Les échauffements fractionnés ou séquentiels (alternance de course et de marche) sont protecteurs 1161.
  • si l’air ambiant est froid et sec, l’enfant asthmatique peut porter un foulard de soie sur le nez.

Le choix d’une activité sportive moins asthmogène peut éventuellement être envisagée les sports les moins asthmogènes sont brefs et intenses ou très prolongés (> 15 mm) mais peu intenses. Ainsi la course de longue durée (endurance) est habituellement asthmogène, car son intensité est élevée, entraînant un débit ventilatoire important. Il n’est cependant pas souhaitable de contre-indiquer cette activité, mais plutôt d’en adapter l’intensité : l’enfant courra à une vitesse sous-maximale qui ne déclenche pas d’essoufflement avec les entraînements successifs, la vitesse de course augmentera.
5. Mise en place du projet d’accueil individualisé
La circulaire du 22 septembre 2003 a créé le PAI. C’est un accord écrit et signé entre l’établissement scolaire (par un représentant enseignant), l’enfant asthmatique et sa famille et le médecin scolaire. Ce protocole est établi selon les recommandations du médecin traitant de l’enfant, il permet à l’enseignant d’administrer à l’enfant les médicaments d’urgence. Les traitements de fond de l’asthme, pris à domicile (habituellement le matin et le soir), restent sous la seule responsabilité des parents, et ne peuvent pas être inclus dans le PAI.

Au-delà de l’asthme, le PAI s’applique à toute pathologie chronique nécessitant la prise de traitements au long cours (épilepsie, diabète…) ou d’urgence (asthme, allergie alimentaire) à l’école, pendant le temps scolaire. Par extension, le PAI a été appliqué au temps périscolaire (cantine, garderie, centre aéré…), mais son application n’est pas une obligation légale. La majorité des municipalités l’acceptent ; cependant. en cas de refus, il faut favoriser le dialogue réciproque pour éviter une situation de blocage qui tient le plus souvent à la peur des enseignants due à la mauvaise connaissance de la pathologie et des modalités d’administration des médicaments. L’enseignant d’EPS, quant à lui, avait une obligation institutionnelle d’accueillir l’enfant asthmatique pendant les cours. Le PAI a accentué cette obligation.
Il est donc important de détailler ce PAl, car implicitement il est demandé à l’enseignant d’assumer une responsabilité médicale, n’est donc important qu’il possède des connaissances sur l’asthme et son traitement préventif et curatif. L’intégration de l’enfant ne pourra qu’en être améliorée. A noter que 43 % des PAI sont ainsi rédigés pour asthme.
6. Orientation professionnelle
Celle-ci doit être discutée le plus précocement possible. Avant toute décision. l’adolescent doit bénéficier d’une évaluation par le médecin scolaire. Un questionnaire. rempli par la famille, recherche les antecedents familiaux et personnels de l’élève. L’asthme doit être le mieux caractérisé possible: fréquence des crises, facteurs déclenchants, traitements, résultats des examens paracliniques.

Suivent l’examen clinique et surtout le dialogue sur les projets personnels de l’adolescent. Le médecin doit être au courant des professions les plus à risque d’asthme professionnel, éventue-llement s’appuyer sur un bilan allergologique et une spirométrie avec test de provocation bronchique non spécifique, et exprimer par écrit un avis qui émet. après concertation avec le médecin traitant ou spécialiste, une aptitude avec ou sans réserve. Les quatre métiers les plus à risque d’asthme professionnel sont ceux de boulangerpâtissier, peintre-carrossier, coiffeur et travailleur du bois, mais aucun métier n’est contre-indiqué a priori. Les professions à haut risque d’inhalation d’allergènes de haut poids moléculaire (latex, farines de céréales, phanères d’animaux, enzymes protéolytiques ….) seront plus facilement déconseillées chez l’allergique que celles à risque d’inhalation d’allergènes de bas poids moléculaires (poussière du bois. sulfites, isocyallates…) ou de substances irritantes (formaldéhyde).

En pratique, la motivation de l’adolescent pour exercer le métier choisi et son évolution professionnelle possible (exemple du boulanger devenant chocolatier-glacier exclusif) sont toujours à prendre en considération dans la décision finale. En cas de contre-indication médicale formelle, une solution de remplacement adaptée doit être trouvée.

7. Conclusion
D’éventuels facteurs favorisant la crise d’asthme, tels les allergènes ou l’activité sportive, sont présents à l’école. Cependant, un bon contrôle de la maladie asthmatique, évitant dispenses et absentéisme, ainsi qu’un dialogue concerté entre l’école et le médecin traitant, permettront d’aplanir les difficultés rencontrées par l’enfant asthmatique à l’école.