Sur la peau de bébé…
Malgré tous les progrès des échographies (couleur, 3D) pratiquées lors de la grossesse, la grande majorité des lésions cutanées ne seront découvertes qu’au moment de la naissance, ce qui sera parfois une mauvaise surprise pour les parents.
Il est ici question des « anomalies bénignes » qu’on peut rencontrer (en dehors de tout contexte génétique particulier) et qui ne sont guère détectables en anté-natal.
Il arrive effet qu’un nouveau-né montre par endroits des plaques ou des taches, qui peuvent surprendre par leur étendue et leur localisation.
Il y en a de différentes sortes.
Certaines ont une origine vasculaire, ce sont des petits anomalies au niveau des capillaires (petits vaisseaux qui relient les veinules aux artérioles):
- les angiomes plans, souvent appelés « taches de vin »; ce sont des anomalies qui touchent les capillaires au niveau du derme superficiel et moyen. Ce sont des angiomes dits « matures », car ils ne régressent pas avec l’âge et persisteront toute la vie. On peut en trouver partout, le visage, le cou, l’abdomen, le dos. On peut les traiter plus tard par laser à colorant pulsé, s’ils ont un impact esthétique. Certains de ces angiomes, s’ils sont situés près de l’orbite d’un oeil, nécessitent de pratiquer quelques examens complémentaires, par exemple une échographie-doppler, éventuellement un scanner et une angiographie du crâne pour s’assurer qu’il n’y a pas la même chose dans le cerveau, mais c’est rare. Ce sont des lésions bénignes dans la majorité des cas.
- Les angiomes en relief, dits tubéreux ou immatures. On parle même d’hémangiomes, on les retrouve plus souvent chez les prématurés. On peut les repérer n’importe où sur le corps. C’est une tuméfaction vasculaire infantile bénigne, qui correspond à un excès de vaisseaux sanguins dans la peau. La plupart du temps, ils vont régresser naturellement en étant passés par une phase de croissance (au début ils peuvent ne mesurer que la taille d’un grain de riz, pour devenir plus grand de la taille d’un petit pois, voire d’une mirabelle, pour se stabiliser vers 10 à 15 mois, et ensuite régresser en couleur et en volume dans les années suivantes. S’ils sont localisés à des endroits où ils peuvent devenir compressifs (sur les paupières, sur le nez, la bouche) ou s’ils sont volumineux, des traitements peuvent être proposés (laser et désormais dans certains cas un traitement par médicament (des bêta bloquants). Ils sont bénins dans la grande majorité des cas.
D’autres sont des taches dites pigmentaires (coloration plus foncée de la peau) : taches café au lait?
On les appelle les « taches café au lait ». Elles sont en général brunes, sans poils le plus souvent. Localisées n’importe où, elles ont tendance à foncer si elles sont exposées au soleil. Si ces taches sont nombreuses (plus que 5 et de taille supérieure à 0,5cm, le pédiatre regardera s’il n’y a pas d’autres lésions associées, il complétera le bilan. 10% des bébés ont des taches café au lait.
Il ne faut pas les confondre avec un naevus (au pluriel on dit des naevi), qui est d’origine embryonnaire (mais pas héréditaires). Il y en a de différents types, le dermato pédiatre fera un diagnostic précis. Dans certains cas on peut les retirer, mais on a le temps.
Les taches café-au-lait multiples de l’enfant sont un motif fréquent de consultation et une source d’inquiétude parfois importante pour les parents. Pour le praticien, elles constituent parfois un défi clinique – déterminer le caractère éventuellement syndromique et/ou héréditaire de TCL multiples –, mais également pratique – de temps, d’écoute et de mots choisis dans l’annonce éventuelle “d’une mauvaise nouvelle” (https://www.has-sante.fr/jcms/c_698028/fr/annoncer-une-mauvaise-nouvelle) – en cas de suspicion de génodermatose.
Les TCL se définissent comme des macules uniformément pigmentées d’une couleur variant du brun clair au brun noir, parfois discrètes, typiquement rondes ou ovales. Leurs contours peuvent être réguliers, lisses ou irréguliers et déchiquetés. Leur taille est variable et augmente avec la croissance corporelle. Elles peuvent être congénitales ou apparaître dans les premières années de vie. L’examen histologique, rarement utile, met en évidence une augmentation du contenu en mélanine des mélanocytes et des kératinocytes, sans prolifération mélanocytaire.
Taches café-au-lait physiologiques:
La TCL solitaire constitue une “tache de naissance” banale et physiologique du nouveau-né. Elle peut être délicate à repérer au cours des premières années de vie. La fréquence d’une ou plusieurs TCL dans la population générale est plus élevée chez les nouveau-nés d’origine afro-américaine que d’origine caucasienne ou eurasienne et varie avec l’âge de découverte.
À titre d’exemple, 2 à 3 % des nouveau-nés sont porteur d’une ou plusieurs TCL et 0,3 % des enfants d’âge scolaire ont plus de trois TCL.
Taches café-au-lait multiples, des marqueurs potentiels d’affections génétiques: plus grave?
De nombreuses affections génétiques comportent des TCL multiples mais, dans la pratique quotidienne, seules quelques-unes devront être recherchées de prime abord par le praticien : au premier plan, la neurofibromatose de type I (NF1), plus rarement le syndrome de Legius, la neurofibromatose de type II (NF2), le syndrome de Noonan avec lentigines multiples (ancienne dénomination de syndrome LéOPARD) et, malgré sa rareté, le syndrome de déficience constitutionnelle des gènes MMR (CMMRD, pour Constitutionnal mismatch repair deficiency) du fait de sa gravité potentielle. En revanche, le syndrome de McCune-Albright se caractérise plus par de larges macules brunes segmentaires qu’une multiplicité de TCL. De même, le syndrome du chromosome en anneau et l’ataxie-télangiectasie sont généralement inaugurés par une atteinte neurologique au premier plan.
D’autres lésions peuvent aussi exister:
- L’érythème toxique du nouveau-né, c’est un mot barbare pour quelque chose de très bénin qui touche jusqu’à 40% des nouveau-nés. Localisé surtout sur le tronc. Il s’agit d’un érythème adaptatif à l’environnement « extra-utérin ». Ça disparaît tout seul en général. Il n’y a rien à faire.
- Des petites pustuloses sur le front par exemple, qui peuvent s’étendre sur les paupières et les joues ; on parle de pustulose céphalique bénigne ça part tout seul aussi. Parfois on nettoie avec un gel nettoyant simple, ca suffit.
- Des petits points blancs sur le nez de votre bébé, on parle de grain de milium, c’est transitoire. N’y touchez pas, ca part tout seul.
- Très rarement, une lésion pendulaire est attachée sur l’oreille, comme un petit sac de peau : on parle de fibrochondrome, ca peut se retirer par un petit geste chirurgical si besoin, mais il n’y a rien d’urgent.
- Les taches « mongoliques » : ce sont des lésions banales chez un nouveau-né normal. C’est une large tache à contours flous (elle peut parfois prendre tout le dos), bleuâtre, à n’importe quel endroit du corps (surtout bas du dos, épaules, bras), il peut y en avoir plusieurs. Elle touche de préférence les populations d’origine asiatique, africaine, méditerranéenne. Ça disparaît pendant les 3 à 5 années qui suivent. Il n’y a rien à faire.
- D’autres lésions complexes peuvent exister, plus rares, le dermato pédiatre aura alors donné son avis à la maternité.
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Et les naevus? Un risque que ca évolue vers un mélanome? (cancer)
Les UV sont le principal facteur de risque, en particulier chez les sujets qui ont été exposés avant l’âge de 35 ans. Les critères cliniques de suspicion de malignité incluent l’apparition récente de la lésion, sa croissance rapide, son hétérogénéité en taille et en couleur.
Contrairement à l’adulte, l’enfant a peu d’exposition cumulée et est de plus en plus protégé contre les UV. Pendant l’enfance, les nævus apparaissent de manière physiologique. Les nævus acquis sont par définition en croissance avec l’enfant. Par nature plus gros et plus hétérogènes, les nævus congénitaux (1 % des nouveau-nés) sont aussi plus inquiétants. Les critères diagnostiques histologiques diffèrent également de ceux de l’adulte. L’enfant n’est à l’évidence pas un adulte en miniature.
En pratique, le mélanome est une pathologie rare chez l’enfant. En France, on estime que le nombre de cas de mélanome pédiatrique n’excède pas 10 par an. Avant l’âge de 10 ans, les « mélanomes » sont de très bon pronostic
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