Allergie au latex : nourriture manipulée par des gants en latex !

Et si certaines allergies dites alimentaires étaient liées non pas à l’aliment lui-même, mais à une contamination de cet aliment lors de sa manipulation à l’aide de gants en latex ? Une observation publiée dans le « New England Journal of Medicine » soulève le problème de façon nette.

Depuis1985, date à laquelle on utilise couramment des gants en latex pour effectuer des soins, entre 5 et 10 % des soignants sont allergiques au latex. Dans ce cadre, I’observation rapportée par une équipe de Boston dans le « New England Journal of Medicine » est digne d’intérêt.

L’histoire est celle d’une parodontiste de 46 ans qui, cinq ans après avoir commencé à utiliser des gants en latex pour travailler, développe des manifestations variées d’intolérance au latex : dermatose, congestion nasale etasthme. Son allergie est confirmée par des tests. Un jour, dans le cadre d’un bilan de stérilité, elle subit une échographie endovaginale avec une sonde contaminée par le latex; le résultat ne tarde pas : démangeaisons vaginales et abdominales, wheezing, dyspnée, hypotension.

Elle décide de ne plus utiliser de latex à son cabinet, et son état s’améliore.

Restaurants et vendeurs gantés

Mais, dans les sept ans qui suivent, elle remarque un fait troublant : alors qu’elle développe des réactions allergiques lorsqu’elle prend un repas au restaurant ou lorsqu’elle mange des produits qu’elle achète au marché, mais qui sont manipu lés par les vendeurs à l’aide de gants en latex, en revanche, elle n’a aucune réaction avec les mêmes aliments quand ils n’ont pas été au contact avec du latex. Donc, on ne peut pas dire qu’elle est allergique à ces aliments.

En revanche, tout se passe comme si elle avait des réactions au latex qui a contaminé les aliments. On lui fait donc subir, avec son consentement, une épreuve simple en deux temps, cela en double aveugle. Premier temps : on lui fait boire du jus d’orange que l’on a agité avec un gant en latex.

Résultat : trente-cinq minutes plus tard apparaissent un wheezing, une sensation de striction dans la poitrine et un flush au niveau de la figure et des lèvres; on doit lui administrer de la prométhazine et de la prednisone pour obtenir la régression des symptômes, qui ne se reproduisent pas. Second temps : on lui fait boire un autre jus d’orange, mais sans l’avoir remué avec un gant en latex; résultat : aucune manifestation allergique. « Cette patiente n’est probablement pas unique », font remarquer les auteurs, qui rappellent une étude troublante de Kim et Hussain, récemment publiée (« A1lergy Asthma Proc », 1999; 20 : 95-97) : des allergies alimentaires avaient été diagnostiquées chez de nombreux sujets allergiques au latex sur la base de manifestations survenues après ingestion d’aliments, mais les tests avaient été négatifs.

Un problème non reconnu chez les professionnels de l’alimentation

« Certains de ces patients pouvaient avoir une réaction à une contamination par le latex plutôt qu’à l’aliment lui-même », avancent les auteurs, qui ajoutent : « Bien que certains aliments aient une réaction croisée avec le latex, une réaction croisée n’est probablement pas la cause de la plupart des réactions rapportées. » Jusqu’à présent, on n’a pas reconnu comme un problème la notion de sensibilisation au latex chez les personnes qui manipulent des aliments avec des gants en latex.

Peut-être parce qu’ils utilisent des gants moins souvent que les soignants, parce qu’ils changent de gants moins souvent et parce que la surface poudrée du gant est humidifiée par les aliments. « Néanmoins, I’élimination des gants en latex, qui est en cours chez les soignants, devrait être étendue aux professions qui manipulent les aliments, pour protéger les consommateurs sensibilisés par d’autres voies », concluent les auteurs.