Probiotiques, prébiotiques, postbiotiques, symbiotiques, dans les laits infantiles: intérêt pour le nourrisson

Il est temps de faire le point dans cette jungle des appellations

Le microbiote en cas d’allaitement

Le microbiote des nouveau-nés et nourrissons s’installe au cours des premières années de la vie et se stabilise après 3 ans. Il colonise d’abord le bébé au moment de la naissance lors du passage par la voie génitale, grâce à l’implantation de certaines espèces du microbiote intestinal de la mère, dont les Bifidobacterium et les Bacteroides .

Ensuite, l’allaitement maternel favorise la croissance des bifidobactéries grâce à la richesse en oligosaccharides du lait de mère. L’allaitement maternel apporte également des Bifidobacterium spp., Lactobacillus spp. et Staphylococcus spp., naturellement présents dans le lait de mère. Les bifidobactéries représentent jusqu’à 90 % chez les nourrissons nés par voie basse et allaités. L’allaitement maternel est le facteur influençant le plus fortement le microbiote digestif des nourrissons la première année de vie.

Le microbiote chez le nourrisson nourri au lait infantile

Les nourrissons sous lait infantile ont un microbiote intestinal qui mature plus rapidement que celui des nourrissons sous allaitement maternel. En effet, leur microbiote se diversifie plus tôt, avec un enrichissement en bactéries anaérobies, comme les Clostridium, et une moindre représentation des bactéries dites “bénéfiques” – bifidobactéries et lactobacilles – par rapport aux nourrissons allaités, qui sont la référence. Les nourrissons nés par césarienne ont également plus de Clostridium et de bactéries à potentiel pathogène, et moins de bifidobactéries et de Bacteroides].

réf: Réalités Pédiatriques Lemoine A. 10 janvier 2022

Les probiotiques dans les laits de substitution, c’est quoi?

Ce sont des organismes vivants très petits qui auront un effet bénéfique sur l’homme, l’enfant, à condition qu’ils soient donnés à bonne dose. Ce ne sont pas les mêmes qu’on retrouve dans le lait de la maman( lait maternel).

Ajouter des organismes vivants (les probiotiques) dans un lait qui est vendu sous forme de poudre…cherchez la prouesse. Peu de laits se vantent d’y arriver, car le résultat n’est pas du tout le même que les probiotiques qu’on trouve dans le lait « vivant » et frais de la maman.

Toutes les études sérieuses faites à l’heure actuelle restent prudentes dans la mesure où elles estiment qu’il n’y a pas de données assez solides pour recommander ces laits de substitution enrichis en pro biotiques.

Gardons en mémoire que les seuls pro biotiques ayant montré une petite activité sur les diarrhées pour nourrissons, sont Bifibacterium lactis Bb12, le lactobacillus reuteri ATCC55713, la lactobacillus salivaires CEC5713).

 

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Les prébiotiques?

Ne pas confondre: ce sont des substances non digestibles qui vont agir sur l’homme en stimulant soit la croissance soit l’activité de petites bactéries de la flore colique classique habituelle. (qui intervient dans la digestion des aliments, du lait)

Nous y retrouvons des fructo-oligosaccharides, des galactophores-oligosaccharides et des oligosaccharides acides, pour ceux qui veulent savoir.

Là aussi, le lait de la maman en contient aussi, MAIS ce ne sont pas les mêmes.

Des effets positifs parfois en augmentant la fréquence des selles chez certains nourrissons ayant tendance à être constipé, plus rarement un peu moins de risques de survenues de manifestations allergiques et d’eczéma. 

Mais dans l’ensemble, cela reste modeste comme effet.

Il n’y a donc pas à recommander ces laits enrichis en prébiotiques dans l’état actuel des connaissances, sauf pour quelques rares marques très ciblées, votre pédiatre vous dira.

Les symbiotiques

Ce sont des formules qui contiennent à la fois des pré et des pro biotiques.

Aucune analyse ne montre leur efficacité.

Il n’y a donc à ce jour aucune raison de conseiller les laits enrichis en symbiotiques.

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Les ferments lactiques

Ce sont des formules de lait qui, lors de leur fabrication, sont fermentées avec des bactéries qui produisent de l’acide lactique. (à partir du lactose du lait, qui est un sucre).

Le lait ainsi fabriqué ne contient donc plus de bactéries vivantes, mais a simplement bénéficié de ce processus de fabrication. (digestion partielle du lactose (sucre) et des protéines).

Les études, les méta-analyses faites jusqu’à présent n’ont pas réussi à démontrer une indication utile pour ces laits fabriqués avec l’aide de ferments lactiques.

Donc acte !

Les Oligosccharides du lait humain (HMO)

Le lait de la maman contient 200 différents oligosccharides (polymères contenant un petit nombre de sucres dits simples) = 3è composant le plus important dans le lait maternel après le lactose (sucre) et les lipides.

Les études là aussi ne sont pas suffisantes à ce jour, mais certains effets sur la réduction de certains troubles mineurs (gaz, pleurs, irritabilité, régurgitions) et de certaines infections respiratoires sont relevés dans certaines études.

A suivre, donc, pour des indications ciblées.

Lactoferrine

C’est une protéine dite soluble du lait, on la retrouve à une concentration de 2g par litre dans le lait maternel.

 Elle va agir le long du tube digestif de bébé, elle permet de mieux absorber le fer du lait de la maman. 

Mais elle a d’autres actions sur les défenses immunitaires, surtout chez les prématurés et les bébés qui ont un faible poids à la naissance.

Son utilité demeure d’actualité dans ces cas.

Où en sommes-nous alors en 2022?

De nombreux progrès ont été réalisés au cours de ces dernières années pour tenter d’améliorer la composition des laits infantiles et se rapprocher au mieux du lait de mère, afin que le microbiote et l’immunité des nourrissons non allaités soient les plus proches de ceux des nourrissons allaités. Il n’existe malheureusement pas à ce jour de formule parfaite qui associerait tous les “ingrédients” pour mimer exactement le lait de mère, qui lui-même varie au cours du temps et en fonction de l’âge du nouveau-né et du nourrisson.

Le choix de la formule infantile revient aux parents parmi une gamme très large sur le marché, éventuellement après conseils éclairés de leur médecin, pédiatre ou pharmacien en fonction des preuves d’efficacité plus ou moins solides présentes dans la littérature (effets démontrés in vitro ou chez l’animal, mais manque d’études cliniques prouvant des effets bénéfiques cliniques pertinents). Cependant, bien que l’impact sur le microbiote soit de mieux en mieux décrit, les mécanismes et les conséquences positives ou négatives à long terme sur l’immunité de ces pré-pro-sym-postbiotiques, donnés précocement dans la vie lorsque le microbiote et le système immunitaire sont immatures, restent encore à éclaircir.

réf: Réalités Pédiatriques Lemoine A. 10 janvier 2022

Quel lait choisir alors enrichi ou non?

C’est votre pédiatre qui vous conseillera en fonction de l’histoire de votre nourrisson, de sa digestion, de son transit, de son poids à la naissance, de son statut éventuel d’ancien prématuré.

Ne succombez pas aux sirènes « commerciales » et aux annonces attractives.

Cet article a été écrit en se référant à l’article du Pr P.Tounian, publié dans le numéro de Réalités pédiatriques n°228 de février 2019.