Depuis l’annonce par l’échographiste que vous attendez des jumeaux (ou peut-être des triplés), votre liste de questions s’allonge. Vous vous êtes renseignée ou rapprochée de personnes ayant un vécu avec des jumeaux, vous serez peut-être allée sur des forums et là…patatras, les questions n’en finissent plus.
Des jumeaux, c’est juste un peu plus de travail, d’accord, mais vous serez certainement bien entourée une fois qu’ils ou elles seront là.
On parle dans notre jargon de gémelliparité. Elles sont désormais en nombre quasi constant en France, environ 1 pour 80 grossesses.
Un petit rappel de biologie
– on distingue les grossesses dizygotes, ce sont les plus fréquentes, sept fois sur dix; c’est une ovulation double, donc deux ovules différents, qui sont chacun fécondés par un spermatozoïde.
– et les grossesses monozygotes se voient trois fois sur dix. Ici, la grossesse résulte de la division d’un même oeuf à un stade plus ou moins précoce de son développement. Donc ce seront deux jumeaux de même sexe; il faudra cependant bien examiner le placenta et les membranes pour savoir si ce sont de vrais ou de faux jumeaux. Mais parfois, ça ne suffit pas, il faudra faire une étude détaillée des groupes et sous-groupes sanguins.
Les questions que je me pose au début
– y a-t-il plus de risque d’accoucher prématurément? En effet, une gémelliparité peut être cause de prématurité (20 à 30% des futures mamans de jumeaux accouchent avant 37 semaines), voire d’hypotrophie (petit poids pour l’âge gestationnel, environ 35 à 40% des grossesses gémellaires); il faudra alors surveiller leur glycémie, leurs poumons, leur appareil digestif comme tout prématuré. (voir ce chapitre).
– mes bébés peuvent-ils avoir davantage de risque de malformation? il est vrai que le pourcentage est plus élevé chez les jumeaux monozygotes que dans la population générale, mais cela est repéré très tôt pendant la grossesse. Et ce pourcentage est faible.
– on m’a parlé d’un risque de jumeau transfuseur- jumeau transfusé, qu’est-ce que c’est au juste? c’est rare, il peut y en avoir un qui est très anémique et l’autre qui a trop de globules rouges, ce qui n’est pas bon non plus. En gros, l’un prend tout et laisse peu à l’autre, cela se voit quand ils partagent le même placenta. Une prise en charge spécifique se fera à la naissance, car ce peut être grave.
– puis-je donner le sein à mes jumeaux en même temps? Bien entendu. Et le plus tôt possible sera le mieux, si c’est votre choix. Les conseils pour allaiter si vous avez des jumeaux sont traités à l’article 40.
Congé post natal et travailleuses familiales
– Il est vivement conseillé de prolonger le congé post natal de deux semaines (vous y avez droit); et celui-ci peut être allongé si besoin, votre gynécologue s’en chargera.
– Des travailleuses familiales ou TISF (technicienne d’intervention sociale et familiale) ou des AVS (auxiliaires de vie sociale) peuvent venir à la rescousse, en fonction des ressources de votre couple et de votre quotient familial. (si vous avez des triplés, quelles que soient vos ressources, tout le monde y a droit). Vous pouvez en effet ressentir le besoin d’être secondée dans les soins à donner à vos enfants et pour certaines tâches. Les associations de travailleuses familiales et d’aides ménagères emploient un personnel qualifié qu’elles mettent à disposition des familles qui font appel à elles dans ces circonstances. Vous pouvez vous renseigner auprès de votre CAF pour demander une prise en charge.
– vous avez droit, pendant la première année, à 200 heures d’aide à domicile pour être accompagnée à domicile dans toutes vos tâches.(pour les jumeaux, mais aussi pour les tâches domestiques). Pensez à demander à votre mutuelle.
– vous pouvez également contacter la PMI (protection maternelle et infantile) dont vous trouverez l’adresse la plus proche de chez vous auprès de votre mairie. Une puéricultrice pourra se déplacer à votre domicile pour vous épauler et vous conseiller.
Comment vous déplacer avec des jumeaux?
La première sortie est souvent chez le pédiatre ou le gynécologue. Il vous faudra soit être accompagnée, soit si vous vous sentez autonome, vous organiser.
Voyez notre article dédié à « Me déplacer avec des jumeaux : les conseils pratiques » dans le livre Bébé Premier mode d’emploi écrit par le Dr Arnault Pfersdorff, fondateur de pediatre-online:
Des jumeaux, c’est un budget presque double
– Si vous avez choisi la formule du lait maternisé, votre pédiatre pourra intervenir auprès des fabricants de lait pour vous obtenir certains prix préférentiels. N’hésitez pas non plus à négocier auprès de votre pharmacien habituel, ils sont souvent compréhensibles et accepteront bien volontiers…de baisser leur marge pour vous garder comme cliente.
– Pour les couches, là aussi ça coûte des sous: Ne prenez pas les plus chères, ce ne sont pas forcément les plus efficaces. Vous pouvez aussi vous tourner vers les couches lavables, la tendance revient (voir article 45). C’est nettement plus économique et…moins polluant.
– pour les vêtements: pour assurer un turn-over, il vous faudra prévoir assez de bodies (une quinzaine), pyjamas (une dizaine), pantalons en matières moelleuses pour leur confort (6 à 8), les hauts (mélange de T-shirt à manches courtes et manches longues et également de petits pulls en hiver _prévoir une quinzaine de T-shirts et 5 à 8 gilets). Pour les sorties en extérieur, c’est bien de prévoir 2 combis pilotes (voir ci-dessous) s’ouvrant par devant pour chaque enfant (en hiver ça tient bien chaud). Une couleur différente pour chacun? À vous de voir. Prévoyez aussi moufles et bonnets (2 par enfant). Pour les chaussures, ce n’est pas nécessaire avant 11 mois.
– prévoyez aussi des bavoirs, ceux à scratch doublé, plus facile à nettoyer. Une quinzaine…
Le rôle de votre famille
Il est essentiel, car vous aurez besoin d’avoir des moments de repos, pour vous détendre ou vous faire un petit cinéma de temps en temps ou une sortie entre copines. Votre équilibre physique et « psychique » en dépend. Ainsi vous serez plus en forme pour vos bébés, vous aurez des choses à leur raconter. Mais tout le monde n’a pas sa famille à proximité. N’hésitez pas à vous faire aider par vos amis pour les courses, les déplacements.
Optimisez tous vos gestes de la vie quotidienne
Avec deux bébés arrivés d’un coup, c’est une surcharge de gestes et d’actions que vous allez apprendre à gérer.
Un petit chiffre qui ne doit pas vous faire flipper: on estime à 12h30 par jour le temps consacré à des jumeaux. Les premiers mois, en tous les cas. Si on compte les tétées, changes, toilettes, lessives.
Avec deux bébés, c’est pas moins de quatorze tétées (ou biberons) par jour.
Vous serez certainement de supers parents, mais vous allez devoir vous organiser pour éviter la fatigue et ne pas passer votre journée (hors phases de sommeil) à gérer les couches, les bains, les tétées ou les biberons, les machines à faire tourner, les courses, etc.
Il y aura des moments où vous aurez des petites chutes de tension, et c’est normal.
Voici quelques conseils pour « optimiser » vos gestes de tous les jours:
- prévoyez un calepin pour vos jumeaux. Page gauche pour l’un, page droite pour l’autre. Vous y noterez ce qui vous semble important: poids, nombre de selles, de pipis, horaires des repas et leur durée, leur température si toutefois vous avez eu besoin de la prendre, leurs progrès et toutes ces petites choses qui vous aideront par exemple le jour où vous irez chez le pédiatre. Ce seront aussi dans quelques années de beaux souvenirs à feuilleter. Sans compter que vos enfants, une fois adultes et eux-mêmes parents, seront les premiers à les parcourir avec intérêt.
- lorsque vous vous occupez d’un de vos enfants, il vous faut avoir l’autre à portée de vue. Prévoyez de l’installer dans un transat, de façon à ce qu’il voie ce que vous faites avec son frère ou sa soeur. Ça le fera patienter et il ne se sentira pas « abandonné ». Ainsi vous l’aurez à l’oeil et…lui aussi.
- avant toute action auprès de vos jumeaux (bain, toilette, change, repas), soyez prévoyante pour tous les objets et accessoires dont vous aurez besoin, afin de ne pas avoir à courir à l’autre bout de l’appartement et de votre maison, car vous avez oublié…la brosse à cheveux, le bavoir ou autre. Rien de tel pour vous épuiser à la longue à force de courir.
- organisez vos courses à l’avance; préparez bien vos listes d’achats. Vous n’hésiterez pas à vous faire livrer si vous le pouvez. Là aussi, votre conjoint aura un rôle important. Partagez-vous ces tâches. Ca vous fera sortir de chez vous, aussi et voir du monde.
- pensez à couper votre téléphone: rien de plus stressant qu’une sonnerie. Elle risque aussi de faire pleurer vos enfants. Cependant, ne vous coupez pas de vos amis, un équilibre est à trouver.
- il ne faut pas hésiter à demander à votre entourage de vous prêter ou de vous donner des vêtements, des articles de puériculture, aucune honte à cela. Au contraire, vos amies seront si contentes de vous aider.
- n’hésitez pas à vous faire aider par vos parents, amis, beaux-parents: ils seront les premiers heureux à vous aider et vous en profiterez bien. Ne cherchez pas à jouer la superwoman.
- quand vos jumeaux vont grandir, n’hésitez pas à les autonomiser rapidement: rien de tel si l’un des deux voire les deux prennent leur biberon tout seul (ce ne sera certes pas avant quelques mois, mais c’est à anticiper). Vous pourrez pour ce faire leur « coincer » le biberon sur un petit coussin pour qu’il pèse moins lourd, vous verrez, ils adoreront. Ça vous permettra de faire autre chose en même temps, tout en les surveillant de près.
- naturellement, calez les repas de vos jumeaux en même temps. Cela se fait quasi naturellement, sauf dans les cas où l’un des deux a un poids nettement moins important que l’autre. Celui-ci aura alors peut-être besoin d’un ou de deux repas en plus par jour (tétée ou biberon). Vous n’avez que deux bras. Si vous donnez le sein, une fois le rythme établi, vous pourrez en mettre un à chaque sein (voir article 40); si vous donnez des biberons, commencez par celui qui est le plus impatient. Avec le temps, quand ils tiendront leurs biberons eux-mêmes, ce sera plus simple. Et une fois la diversification alimentaire démarrée (vers 5 mois), ce sera une cuiller pour l’un, puis une cuiller pour l’autre, etc. Ça veut dire la même cuiller pour les deux, ils ne vont pas en mourir à se passer les microbes. De toutes les façons, ils vont se les partager régulièrement.
- si vous préparez les petits pots vous-mêmes, prévoyez pour deux semaines, voire trois au moins et congelez-les, il n’y a pas à hésiter. Cela vous simplifiera la vie.
- une fois qu’ils tiendront assis (8-9 mois), vive la chaise haute. Une pour chacun. Pour les repas, ce sera plus commode pour votre dos. Attention à bien les y fixer, gare à celui qui voudra se mettre debout et passer par dessus…
- calez aussi leurs phases de sommeil en même temps; vous en profiterez aussi pour avoir vos phases de repos.
- naturellement, donnez les biberons à température ambiante. Ça ne se fait plus de les réchauffer. C’est un gain de temps appréciable.
- il y en aura toujours un qui râlera, car ce n’est pas son tour. Alternez, ne commencez pas toujours pas le même.
- vous apprendrez vite que tous les deux veulent que vous vous occupiez d’eux en même temps. Alors n’hésitez à les porter ensemble, à les mettre sur le même tapis d’éveil, à utiliser une table à langer assez large pour les y mettre tous les deux (bien sécurisée naturellement). Ainsi vous éviterez des pleurs inutiles de « petites » jalousies bien compréhensibles. Ensuite, avec le temps, ils auront compris et patienteront.
- au début, vous pouvez très bien faire dormir vos jumeaux dans le même lit; ce sera plus simple. Pour l’aménagement de la chambre, voyez l’article XXX
- vos jumeaux aimeront chaque jour davantage à être ensemble. Ce sera une joie à partager à trois.
- ne cherchez pas à favoriser leur individualité à tout prix pour qu’ils aient leurs existences propres. Certes, évitez de les habiller pareil, mais si vous cherchez à les séparer, ils chercheront davantage à se retrouver. Donc, ne vous prenez pas trop la tête.
- n’oubliez pas de les appeler toujours pas leur prénom et non « les jumeaux, c’est maman » ou « les jumelles, on va manger ».
- laissez un peu tomber l’intendance de la maison, ne cherchez pas à ce que tout soit parfait comme avant. Priorisez. Un peu de poussière sur les armoires et l’aspirateur passé moins souvent, c’est plus de temps consacré à vos enfants et surtout à vous reposer.
- si vous avez déjà un autre enfant plus grand, n’hésitez pas à l’associer sans pour autant le rendre corvéable à merci ; il ou elle risquerait de se sentir sur la « touche » et pourrait vous le faire sentir dans un 2e temps (troubles du sommeil, agressivité à l’école, refus alimentaire). Si ça arrive, il faudra revoir le temps donné à cet autre enfant.
- les bains, pas de pression, tous les 3 jours ça suffit amplement.
- et n’oubliez pas: vous n’êtes pas une superwoman, il y aura des moments de petits coups de blues ou de fatigue. Si vous vous sentez flancher un peu, parlez-en à vos amis, à la famille, à une psychologue, au pédiatre.
Un dernier petit conseil et pas des moindres après toute cette longue énumération: n’oubliez pas votre couple…Le rôle du papa est primordial, certes. Mais aussi comme conjoint, pas seulement comme père. Laissez-lui une place.
Les 3 livres écrits par le Docteur Arnault Pfersdorff, fondateur de pediatre-online, édités chez Hachette-Famille
- « Manuel Bébé Premier mode d’emploi » Hachette Famille 286 pages 16,95€ Disponible ICI
- « Mon enfant ne dort pas- 7 solutions » Hachette Famille 64 pages 5,95€ Disponible ICI
- « Mon enfant ne mange pas- 7 solutions » Hachette Famille 64 pages 5,95€ Disponible ICI
C’est désormais, depuis janvier 2018, 3 livres qui sont édités chez Hachette et distribués dans toutes les librairies de France, mais aussi Belgique, Luxembourg, Suisse, Canada. Ils s’adressent aux parents. Egalement sur Amazon, Fnac, BNF, etc.