Maladie de Lyme: stop à la « Lyme Mania » ! Mais quid des diagnostics pas faits en temps et en heure?

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Maladie de Lyme: un diagnostic souvent trop tardif.

La maladie de Lyme, dont on parle souvent ces temps-ci dans la presse, est en effet trop fréquemment sous diagnostiquée, d’autant que les techniques de diagnostic par des tests biologiques (prise de sang) ne sont pas fiables. ll nous faut nous baser sur la clinique essentiellement (les symptômes) et l’interrogatoire pour en faire le diagnostic.

Mais la parcours de certains patients est compliqué, avec reconnaissance du diagnostic souvent tardif. Trop tardif.

Ci dessous un article publié par VidalNews qui fait le point et donne des liens très utiles si vous souhaitez en savoir plus.

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Sous la pression d’associations de patients et de médecins, le Ministère de la Santé a annoncé (septembre 2016) la mise en place d’un Plan national de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmises par les tiques (1). Ce Plan vise également à apaiser les tensions qui existent entre infectiologues, ainsi qu’entre associations de patients et l’Assurance maladie, autour des critères diagnostiques et du traitement des formes secondaires et tertiaires de cette zoonose.
 
La prise en charge des formes tardives de la maladie de Lyme
souffre de l’imperfection des outils diagnostiques, des contraintes réglementaires de leur prescription, de la possibilité d’une co-infection par plusieurs agents pathogènes, et de l’existence de recommandations concurrentes et divergentes quant à leur traitement.
 
Les patients se retrouvent ainsi, pour reprendre les mots de Marisol Touraine, « abandonnés et en errance thérapeutique« , certains d’entre eux partant en Allemagne ou en Autriche pour y recevoir des soins qu’ils considèrent comme plus efficaces.
 
C’est dans ce contexte hautement volatile, comme l’a montré une réunion récemment organisée par l’Académie de médecine, que ce Plan national est mis en place, avec l’espoir de faire avancer les connaissances sur la maladie de Lyme.
Un plan national de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmises par les tiques
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La borréliose de Lyme, une zoonose protéiforme
Transmise par la tique Ixodes ricinus, la maladie de Lyme est une borréliose. En Europe, elle est due essentiellement à la bactérie Borrelia burgdorferi, mais également à des Borrelia plus rares (B. afzelii, B. garinii, par exemple).

Les borrélies à l’origine de la maladie de Lyme en Europe ont été regroupées dans un complexe nommé « B. burgdorferi sensu lato« .

Une maladie qui peut évoluer en plusieurs plases
Au stade primaire, la maladie de Lyme provoque un syndrome grippal
accompagné, dans 30 à 60 % des cas, d’un érythème migrant (rougeur en forme de tâche puis d’anneau autour de l’endroit de la morsure de tique).

Non soignée (lésion passée inaperçue ou antibiothérapie non adaptée), elle peut évoluer vers une forme secondaire caractérisée par des arthralgies, des névralgies, des paralysies, une encéphalite, etc.

Toujours en l’absence de traitement, ou après un traitement insuffisant, la forme tertiaire est extrêmement polymorphe, ce qui a amené certains spécialistes à lui appliquer un qualificatif traditionnellement utilisé pour la syphilis, la « grande imitatrice« .
 
Des données épidémiologiques sujettes à controverse
En France, chaque année, le nombre de cas de maladie de Lyme déclarés se situe entre 26 et 27 000, avec de fortes disparités régionales (l’Est et le Centre, qui comportent le plus de forêts et donc de tiques, sont les zones les plus touchées).

Parce que la notification d’un cas exige la présence d’un érythème migrans, il est couramment admis que le nombre réel de cas est 2 à 3 fois plus élevé, ce symptôme n’étant pas systématiquement présent.

La question d’une éventuelle sous-notification des cas de maladie de Lyme a été soulevée en 2014 par le Haut conseil de la santé publique (HCSP) dans son rapport sur le sujet (2). En effet, la constance du nombre de cas en France depuis des années est en conflit avec les chiffres observés dans les pays voisins (Allemagne, Autriche, en particulier).

Dans ces pays, le nombre de cas augmente, cette augmentation étant mise en relation avec les hivers doux, la prolifération des ongulés sauvages (chevreuils, cerfs, sangliers, etc.), l‘accroissement de la surface des forêts et la disparition des prédateurs naturels des tiques, en particulier les amphibiens.
 
Des patients « abandonnés et en errance thérapeutique » qui demandent une reconnaissance de ce qu’ils considèrent être une maladie de Lyme au stade tardif
Lors de la présentation de son Plan national de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmises par les tiques (1), la Ministre de la Santé a reconnu, par ces mots, les difficultés rencontrées par des patients présentant des troubles invalidants qu’ils estiment être dus à des formes tardives de maladie de Lyme.

Ces patients considèrent que les méthodes de diagnostic autorisées aujourd’hui en France, ainsi que les recommandations en terme de traitement de ces formes tardives, ne sont pas optimales. Ils demandent à être davantage reconnus, même si les signes cliniques qu’ils présentent peuvent être considérés comme subjectifs. En cela, leurs revendications rappellent celles des personnes souffrant de fibromyalgie.

Procédures pour diagnostiquer une maladie de Lyme
La plupart des experts s’accordent pour reconnaître que la controverse qui, depuis quelques années, agite la France autour de la maladie de Lyme trouve sa source principale dans ladifficulté à mettre en évidence une infection par Borrelia.

Aujourd’hui, le diagnostic est soit clinique (au stade primaire, avec présence d’un érythème migrans), soit sérologique (en l’absence d’érythème, un test ELISA complété, en cas de positivité, par un Western blot).

Les techniques de mise en évidence directe de Borrelia (PCR) sont insuffisamment sensibles (10 % dans le sang, 20 % dans les urines).
 
Mais il existe de profonds désaccords sur la sensibilité du test ELISA
Si le défaut de sensibilité du test ELISA est reconnu par tous au cours des 8 premières semaines de l’infection (nécessaires à la réponse immunitaire humorale) ou après un traitement antibiotique précoce, les avis divergent sur sa sensibilité dans les formes secondaire et tertiaire.

Dans les débats qui opposent, d’un côté, les associations de patients et la Fédération française contre les maladies vectorielles à tiques (FFMVT, sous la houlette du Pr Christian Perronne, chef de service en infectiologie à l’hôpital de Garches), et de l’autre laSociété de pathologie infectieuse en langue française (SPILF) (3), cette question est centrale. Les premiers s’appuient sur des études montrant une sensibilité du test ELISA de l’ordre de 30 à 50 %, les seconds sur un travail mené par l’European Center for Disease Control qui l’établit à 90 % pour les formes tardives articulaires et cutanées.

Pour cette raison, les associations de patients et la FFMVT demandent la possibilité deprescrire un Western blot en première intention comme c’est actuellement le cas dans certains pays étrangers (ce qui est interdit en France par l’Arrêté du 20/09/2005 modifiant l’arrêté du 3 avril 1985 fixant la Nomenclature des actes de biologie médicale).
 
Des tests diagnostiques présents dans d’autres pays mais non validés en France
Dans certains pays, dont l’Allemagne, d’autres tests diagnostiques existent, par exemple, lestests d’activation lymphocytaire ou le dosage des lymphocytes NK CD57. Ces tests ne sont pas considérés comme validés dans les recommandations de prise en charge de la maladie de Lyme émises par la SPILF en 2006 (3) et qui font toujours loi.

Pour cette raison, de nombreux patients qui craignent de souffrir d’une maladie de Lyme dans sa forme secondaire ou tertiaire vont en Allemagne pour bénéficier de ces tests.

En 2014, le Haut conseil de la santé publique, dans son rapport (2), mettait en avant les insuffisances des tests diagnostiques et demandait déjà un plan visant à la standardisation des techniques de diagnostic et un contrôle de la qualité des prestations des laboratoires d’analyses en la matière. Le HCSP demandait également que soit mis en place un programme de recherches spécifiquement destiné à identifier de meilleurs outils diagnostiques.
 
Le rôle des autres pathogènes de la tique dans la controverse autour de la maladie de Lyme
Pour certains experts comme pour le HCSP, les patients atteints de formes tardives à Western blot négatif pourraient souffrir, en fait, d’une infection par un autre pathogène transmis par les tiques (par exemple, Anaplasma, Bartonella, voire Babesia). Autre hypothèse, l’apparition de symptômes durables pourrait être le fait d’une co-infection, en particulier par Borrelia etAnaplasma, comme c’est le cas chez le chien où la présence des deux pathogènes augmente fortement le risque de maladie chronique symptomatique.

Les tests diagnostiques actuellement utilisés ne recherchent pas ces agents pathogènes, ce qui a amené certains patients à avoir recours à des tests ELISA destinés aux chiens (qui visent des peptides de Borrelia différents de ceux du test ELISA destiné aux humains, et recherchent des traces d’autres pathogènes des tiques, comme Anaplasma phagocytophilum).
 
Un appel signé d’une centaine de médecins pour dénoncer le sous-diagnostic
En juillet 2016, une centaine de médecins, dont le Pr Perronne, ont signé dans L’Obs un appel demandant, comme l’avait fait le HCSP, qu’un programme de recherche soit mis en place (4) pour développer de meilleurs tests diagnostiques, considérant les tests actuels comme « non fiables ».

Le Pr Perronne dénonçait alors un « scandale sanitaire » et demandait « la prise en compte des récentes données scientifiques afin d’aboutir à un nouveau consensus thérapeutique adapté ».

La SPILF considère au contraire que les tests sont suffisants
Fin juillet, la SPILF  (société de pathologie infectieuse de langue francaise) répliquait (5) en considérant que les tests actuels étaient fiables et suffisants, et donc que leurs recommandations de prise en charge émises en 2006 (3) étaient toujours d’actualité au regard des connaissances actuelles.

Mais entretemps, l’association de patients « Lyme sans frontières » annonçait que plusieurs centaines de patients allaient porter plainte contre les fabricants des tests diagnostiques (6) qui n’avaient pas réussi à identifier leur maladie.
 
La durée du traitement en phase primaire est consensuelle 
Les recommandations en terme de traitement de la forme primaire de la borréliose de Lyme sont consensuelles : amoxicilline ou doxycycline pendant 14 jours, ou 21 jours si érythèmes mgrants multiples ou accompagnés de signes extra-cutanés),

Par contre, les modalités de traitement en phase secondaire ou tertiaire constituent une controverse supplémentaire autour de la maladie de Lyme
Pour les formes secondaire et tertiaire, en France, les recommandations de prise en charge émises par la SPILF en 2006 s’inspirent de celles émises par l’Infectious Disease Society of America (IDSA) la même année (7) : traitement antibiotique de 2 à 4 semaines pour les formes secondaire et tertiaire.

Si des symptômes persistent au-delà du traitement, ils doivent être rattachés à un « syndrome post-Lyme » (dont l’origine auto-immune, suspectée, n’a jamais été établie). Ces symptômes sont pris en charge par des traitements antalgiques et, éventuellement, desanti-dépresseurs.
 
Mais des associations de patients et la FFMVT s’élèvent contre ces recommandations, faisant valoir que la majorité des experts de l’IDSA avaient, en 2006, des liens d’intérêt avec des assureurs privés américains (et que ceux-ci avaient intérêt à ce que les traitements soient le plus court possible).

Ils mettent en avant les recommandations publiées en 2011 par l’International Lyme and Associated Diseases Society (ILADS) (8), en faveur d’un traitement antibiotique poursuivi jusqu’à disparition des symptômes, soit plusieurs mois, voire une année, et nécessitant parfois une association de plusieurs antibiotiques.
 
La SPILF justifie son refus d’envisager les traitements antibiotiques de longue durée sur la base d’une étude randomisée néerlandaise (280 patients, 12 semaines de traitement),publiée en 2016 dans le NEJM (9), qui n‘a pas montré de bénéfice sur la qualité de vie d’un traitement antibiotique plus long.
 
Des professionnels de santé réprimandés par la CNAM, voire poursuivis en justice
Cette controverse autour de la durée du traitement antibiotique dans les formes secondaire et tertiaire de la maladie de Lyme a eu pour conséquence que certains médecins français ayant opté pour les recommandations de l’ILADS se sont vus rappelés à l’ordre par la CNAM pour prescription abusive d’antibiotiques.

De plus, un procès est actuellement en cours contre deux pharmaciens de Colmar (10), l’une pour avoir proposé des Western blots hors ELISA positif dans son laboratoire d’analyses, l’autre pour avoir proposé à la vente un mélange d’huiles essentielles censé soulager les formes tardives de borréliose.

Le 20 septembre 2016, l’Académie de médecine a publié (11) une prise de position et a organisé une réunion sur le thème de la maladie de Lyme (12). Cette réunion a vu le Pr Christian Perronne être violemment pris à partie par le Pr Marc Gentilini, l’accusant « d’affoler les populations sans crédibilité scientifique« , pendant que le Pr François Bricaire, rédacteur de la prise de position de l’Académie, regrettait la « Lyme mania » qui sévit aujourd’hui en France.
 
Un plan national de lutte comportant de nombreuses mesures qui pourraient permettre de « calmer les esprits »
C’est dans ce contexte extrêmement volatile que la Ministre de la Santé vient d’annoncer unPlan national de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmises par les tiques (1) qui décline diverses mesures :

  • installation de panneaux d’information pour les promeneurs et les randonneurs à l’entrée des forêts ;
  • mise en place d’une application mobile permettant de signaler la présence de tiques, à l’instar du dispositif existant pour les moustiques ;
  • amplification des actions d’information à destination de la population, et de formation pour les professionnels de santé ;
  • mise à disposition des médecins d’un bilan standardisé décrivant la liste des examens permettant un diagnostic complet chez toute personne présentant des symptômes évocateurs ;
  • mise en place d’un protocole national de diagnostic et de soins (PNDS), élaboré en lien avec les associations, pour assurer une prise en charge standardisée et remboursée sur l’ensemble du territoire ;
  • ouverture en 2017 de centres de prise en charge spécialisés, qui seront également un lieu de formation des professionnels ;
  • mise en place d’une cohorte constituée de patients suivis dans ces centres de prise en charge spécialisés, pour améliorer les connaissances scientifiques sur la maladie ;
  • développement de recherches autour du diagnostic par l’Institut Pasteur ;
  • conduite de recherches approfondies dans le cadre du projet « Oh ! Ticks » (13) soutenu par la SPILF et visant à mieux connaître l’ensemble des maladies transmises à l’homme par les tiques.

Par ailleurs, ce plan fait état de l’évaluation en cours de « l’opportunité d’inscrire la maladie de Lyme dans la liste des affections de longue durée« , une revendication des associations de patients. Aucune information n’a été donnée sur le budget alloué à ce plan national.
 
Pour aller plus loin

  1. La synthèse du Plan national de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmises par les tiques, Ministère de la Santé, septembre 2016.
  2. Le rapport du Haut conseil de la santé publique sur la maladie de Lyme, 2014.
  3. La position de la SPILF en réponse à l’appel des médecins publié dans L’Obs, SPILF, juillet 2016.
  4. « Maladie de Lyme. Le cri d’alarme de 100 médecins : Il y a urgence ! », L’Obs, 13 juillet 2016
  5. Les recommandations de la SPILF sur la prise en charge de la maladie de Lyme, 2006.
  6. Pourquoi la maladie de Lyme est-elle si difficile à diagnostiquer ?, Sciences et Avenir, juin 2016
  7. Les recommandations de l’IDSA sur la prise en charge de la maladie de Lyme, 2006. (en anglais)
  8. Les recommandations de l’ILADS sur la prise en charge de la maladie de Lyme, 2014. (en anglais)
  9. Berende A et al. « Randomized Trial of Longer-Term Therapy for Symptoms Attributed to Lyme Disease. » N Engl J Med. 2016 Mar 31;374(13):1209-20 (étude randomisée néerlandaise sur l’efficacité de 12 semaines de traitement antibiotique contre la maladie de Lyme).
  10. Le procès en appel des « rebelles » de la maladie de Lyme s’ouvre à Colmar, Le Monde, 7 octobre 2016
  11. Maladie de Lyme. Prise de position de l’Académie nationale de médecine, François Bricaire, Académie de médecine, 20 septembre 2016
  12. L’Académie de médecine face à la « Lyme mania », JIM.fr, 21 septembre 2016
  13. Une présentation du projet « Oh ! Ticks », groupe SPILF – COREB, juin 2015.

Sur VIDAL.fr : 
VIDAL Reco Maladie de Lyme

Sources : Ministère des Affaires sociales et de la Santé

Article publié par VidalNews octobre 2016

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