De la rhinite à l’asthme ?

D’après le Pr Paul Van Cauwenberge, département ORL, Gand, Belgique, décembre 1999 On a observé que beaucoup de patients ayant une rhinite présentaient également des signes d’asthme, mais les chercheurs se demandent s’il ne s’agit pas plutôt d’une coïncidence que d’une véritable relation entre ces deux affections.

La rhinite est définie comme une inflammation du revêtement muqueux du nez s’associant à un ou plusieurs des symptômes suivants : obstruction nasale, rhinorrhée, éternuement, prurit nasal. On dénombre actuellement trois classes de rhinite : la rhinite allergique, saisonnière ou pérenne; la rhinite infectieuse aiguë, virale le plus souvent, ou chronique; la rhinite non allergique et non infectieuse (on la qualifiait autrefois de vasomotrice). Cette dernière comprend en particulier les rhinites idiopathiques, hormonales, iatrogènes, irritatives, émotionnelles et atrophiques.

Asthme et rhinite

Ces deux pathologies voient leur prévalence s’accroître chaque année (elles ont doublé en dix ans) et apparaissent liées, il est vrai dans des proportions variables suivant les travaux, mais d’autant plus grandes que l’atopie est présente. La continuité et surtout la présence du même épithélium respiratoire participent sans doute à cette association.

Outre ses fonctions esthétiques et olfactives, le nez filtre, humidifie et réchauffe l’air inspiré, rôle essentiel dont témoignent par exemple les conséquences pulmonaires de l’atrophie de la muqueuse nasale.

Pour certains, un stimulus de la muqueuse nasale, qu’il soit chimique, physique (froid) ou immunologique (histamine) peut déclencher un réflexe bronchoconstricteur médié par les neuropeptides SP, NKA, CGRP. Cependant, l’existence d’un tel réflexe est à présent largement remis en cause.

Trois interrogations

Quels facteurs influencent le développement d’un asthme chez un patient présentant une rhinite allergique ? La coexistence asthme-rhinite est pour la plupart des auteurs liée aux mécanismes allergiques, qui touchent à la fois les muqueuses du nez et celles des bronches. Pour Boulet et Pavente (1997), la rhinite allergique, lorsqu’elle est isolée, serait plus fréquemment associée à une sensibilisation aux pollens (arbres ou graminées), alors que la rhinite allergique avec asthme semblerait plutôt liée aux allergènes domestiques.

D’autres travaux ont montré que l’exposition allergénique durant les premiers mois de vie était déterminante dans le développement d’une sensibilisation allergénique spécifique, mais pas quant à son lieu d’expression.

La rhinite allergique est-elle prédicatrice d’asthme ? L’étude de Hiraf (1989) montre que, neuf années après l’apparition d’une rhinite allergique, 40 % des patients développent un asthme allergique. La très récente étude de Leynnert (1999) montre que la présence d’une rhinite allergique multiplie par onze le risque de développer un asthme.

Concernant le mécanisme de l’impact pulmonaire de la rhinite, allergique ou non, quatre hypothèses classiques sont discutées :

  • Rhinorrhée postérieure et contamination des voies respiratoires basses;
  • Absorption par voie sanguine ou lymphatique de toxines ou de médiateurs de l’inflammation;
  • Respiration buccale pouvant être à la source de problèmes pulmonaires;
  • Existence d’un réflexe nasobronchique;

Les cellules inflammatoires, les médiateurs et les processus impliqués dans la rhinite allergique sont-ils les mêmes que dans l’asthme ? Les principes physiopathogéniques sont similaires dans les deux affections. Il s’agit d’une réaction immunologique à des allergènes aériens mettant en cause les mêmes cellules (mastocytes, lymphocytes Th2, basophiles et éosinophiles) et les mêmes médiateurs (cytokines et IgE).

Thérapeutiques

Il y a 2000 ans, Gallien écrivait que la purge des voies respiratoires supérieures est nécessaire pour soulager les symptômes d’asthme. Cette observation a été depuis souvent confirmée : une rhinite allergique mal contrôlée aggrave l’asthme existant, et son traitement l’améliore. En revanche, aucune étude n’a démontré d’amélioration des symptômes de la rhinite allergique à la suite d’un traitement pour l’asthme.

Glucocorticoïdes locaux, cromones et antihistaminiques sont utiles dans la rhinite allergique et/ou dans la maladie asthmatique. Par contre, la différence entre modes de contrôle adrénergique à l’étage ORL et respiratoire bas fait proposer des agonistes alpha-adrénergiques (vasoconstricteurs) dans la rhinite allergique et bêta-2 agonistes broncho-dilatateurs dans l’asthme.

La chirurgie ORL (septoplasties, polypectomies) aurait un impact positif sur l’équilibre de l’asthme, mais aucune étude en double aveugle n’a été réalisée qui permettrait d’affirmer qu’une de ces interventions améliore les symptômes d’asthme.