L’enfant trisomique en école maternelle

La loi

Selon la loi, tout enfant a le droit de faire partie de la communauté scolaire. L’intégration consiste à accueillir un enfant différent au sein d’une classe dont le fonctionnement repose traditionnellement sur une relative. II ne s’agit pas de rendre cet enfant différent semblable aux autres, mais de lui proposer un projet adapté à ses compétences et compatible avec les exigences du groupe:intégration n’est pas assimilation.

Que peut-on attendre de la présence d’un enfant trisomique dans une classe maternelle ?

L’expérience de l’intégration scolaire, du moins pendant un temps, est une reconnaissance de cet enfant dans notre société; elle est vécue comme telle par les parents (même si beaucoup des enfants concernés continueront leur scolarité en milieu spécialisé) et leur permet de mieux comprendre leur enfant et son handicap.

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Pour l’enfant

La fréquentation d’une classe peut permettre à l’enfant trisomique de:
– vivre dans un milieu moins protégé, dans lequel l’attention de l’adulte et des autres enfants ne
sera pas polarisée sur lui;
– améliorer son comportement et son attention;
– mieux comprendre les situations, puis les consignes, individualisées puis collectives;
– tirer profit, en termes d’éveil et d’apprentissage, des diverses activités proposées;
– accéder à un certain degré d’autonomie et de responsabilité;
– prendre conscience de ses différences et de ses difficultés, et avoir confiance en ses possibilités;
– comprendre que les autres, adultes et enfants, peuvent attendre quelque chose de lui.

Pour les autres élèves de la classe

Confrontés à la présence d’un enfant trisomique, les élèves de la classe pourront acquérir des notions de tolérance et de solidarité. Ils apprendront à repérer des valeurs qui ne sont pas toujours reconnues dans notre société de compétition. Il revient à l’enseignant de les accompagner dans cette démarche.

Pour l’enseignant

L’accueil de cet enfant représente pour l’enseignant, un supplément de travail non négligeable: observation précise des possibilités de l’enfant, attention très indi,vidualisée, pédagogie novatrice.
Mais c’est cela qui rend l’expérience enrichissante, et ceux qui l’ont tentée notent que l’ensemble de leurs élèves bénéficie de cette approche plus attentive de chaque enfant.

Comment organiser au mieux cette intégration ?

Avant toute intégration scolaire, il est souhaitable que l’enfant ait eu une expérience de socialisation (crèche, haltegarderie, etc.) et qu’il ait acquis un peu d’autonomie et intégré les premières notions de règles de vie collective.

Les cas difficiles

Il faut prévoir l’intégration scolaire si, et seulement, si elle ne nuit pas à l’enfant ni aux autres élèves. Ce serait le cas si:
– l’enfant présente un trouble de la personnalité tel que la vie en groupe l’aggrave, ce qu’il manifestera par des crises d’angoisse, des troubles somatiques, l’augmentation des phénomènes de retrait, actif ou passif;
– l’enfant est réellement agressif, de façon imprévisible et violente. Nous ne parlons évidemment pas là de turbulence, qui serait tolérée chez un enfant ordinaire et doit l’être aussi – ni plus, ni moins – chez un enfant trisomique.
En revanche, nous ne pensons pas que l’absence d’acquisition de la propreté, le risque de chutes ou les capacités d’apprentissage limitées soient des motifs de refus de scolarisation.

Une décision pluridisciplinaire

L’accueil d’un enfant trisomique nécessite l’adhésion de l’équipe pédagogique au complet, chaque membre pouvant être amené à l’accueillir dans sa classe. Mieux vaut orienter l’enfant vers une autre école si cette condition n’est pas garantie.
Le médecin de santé scolaire et/ou le secrétaire de CCPE (Commission de circonscription pré- élémentaire et élémentaire, dont on peut obtenir les références à l’Inspection académique de
département), une équipe pluridisciplinaire (CAMSP [Centre d’action médico-sociale précoce] ou SESSAD [Service de soins spécialisés et d’éducation à domicile], dont on peut obtenir les
références à la CDES [Commission départementale d’éducation spéciale]), seront des interlocuteurs privilégiés pour informer les parents, conseiller et suggérer des stratégies aux enseignants.

Un temps d’observation

Le partenariat entre l’équipe pédagogique, l’équipe de soins et les parents doit se mettre en place.
Une réunion, si possible dès l’inscription de l’enfant à l’école, permettra de:
– faire le point des capacités et des difficultés de l’enfant dans les domaines moteur, intellectuel,
relationnel et comportemental;
– poser toutes les questions qui peuvent lever un malentendu ou une ignorance concernant
l’enfant, les éléments du handicap qui peuvent influer sur la scolarité maternelle, les activités qu’on peut lui proposer, lui imposer;
– harmoniser les temps scolaires et les temps de rééducation;
– déterminer les modalités du temps d’observation de l’enfant, dans la classe proposée. Ce temps doit être suffisamment long pour permettre une meilleure connaissance de l’enfant en n’oubliant pas que lui aussi doit avoir un minimum de repères pour se montrer tel qu’il est: quelques heures disséminées aufil de la semaine dans un groupe où les autres enfants sont ensemble 24 à 27 heures risquent de le marginaliser.

Pendant le temps d’observation, on proposera à l’enfant des moments de simple présence dans la classe, sans autre exigence que celle de ne pas gêner les autres, et des moments de réelle participation.

À l’issue de ces deux temps, on pourra :

– soit renoncer à l’intégration de l’enfant; ce sera le cas si celle-ci s’avère réellement inadaptée, en particulier si l’enfant développe des signes de souffrance sévère;
– soit élaborer, toujours en partenariat, un contrat individuel d’intégration scolaire.

Comment procéder au quotidien ?

Le contrat individuel d’intégration scolaire permet de préciser, sous la responsabilité de l’inspecteur de l’Éducation nationale représenté par le secrétaire de la CCPE, les objectifs et les modalités de l’intégration scolaire de l’enfant.

Se fixer des objectifs clairs et réalistes

Les objectifs ne devront être:
– ni trop ambitieux; il ne s’agit pas de vouloir gommer la différence; le désir ou le rêve de normaliser l’enfant, de protéger ses parents, de réparer une injustice en niant les difficultés, conduit tous les intervenants à une désillusion;
– ni trop limités; il ne suffit pas qu’un enfant ne gêne pas les autres élèves de la classe pour qu’on puisse parler d’une intégration scolaire réussie;
– ni trop flous; l’enfant a besoin de sentir à son sujet un projet clair et consensuel des adultes. Ce projet doit être réaliste, à court et moyen termes et réajustable chaque trimestre.

Maintenir un dialogue régulier

Les contacts entre l’enseignant, les parents et l’équipe de soins peuvent être initiés à la demande de chacun des partenaires. Il est souhaitable que les parents soient régulièrement informés des réussites et des problèmes rencontrés; mieux vaut exprimer une difficulté dès son apparition et chercher à y remédier tous ensemble. De même, expliquer la situation aux autres élèves se révèle souvent bénéfique.

Surmonter certaines difficultés

Les difficultés repérées peuvent provenir de différentes situations.
• L’enseignant ne peut consacrer le temps et l’attention nécessaires à cet enfant :
– le « nouveau contrat pour l’école » prévoit, dans sa proposition n° 19, un aménagement en termes d’effectifs des classes accueillant des élèves trisomiques;
– le directeur de l’école peut également demander la présence d’un auxiliaire d’intégration scolaire. Dans ce cas, il peut rester très vigilant pour que la présence d’un adulte supplémentaire dans la classe n’isole pas l’enfant du reste du groupe, mais soit un réel partage du travail auprès de tous les élèves, collectivement ou en petits groupes. Un projet de création par l’Éducation nationale d’un corpus d’auxiliaires de vie scolaire (dont la formation et le statut restent à préciser) donne de bons espoirs, mais ne doit pas faire croire qu’il s’agit là d’une panacée, qui serait la condition indispensable pour envisager l’intégration d’un enfant trisomique dans une classe ordinaire, et le garant de sa réussite;
– l’enfant peut aussi bénéficier de l’intervention de l’équipe du Réseau d’aide et de soutien aux élèves en difficulté (RASED).

• L’enfant peut développer un comportement inadéquat: trop grande dépendance face à l’adulte, passivité, agressivité, labilité de l’attention, etc. L’enseignant doit exiger de lui qu’il ne perturbe pas l’ensemble de la classe et signaler ces difficultés de comportement à l’équipe de soins.

• Les parents des autres élèves de la classe peuvent exprimer des craintes: moindre attention de l’enseignant pour leur enfant, baisse du niveau de la classe, « mauvais exemple », etc. Un échange doit
s’instaurer, si nécessaire avec la participation d’un médecin.

• Les parents de l’enfant trisomique peuvent avoir une attitude qui risque de freiner le dialogue: trop grandes exigences, trop grande discrétion, refus de transmettre des informations utiles…
Il est parfois très difficile d’évaluer ce que l’enfant apprend réellement à l’école, surtout s’il ne peut pas le restituer sous forme de langage ou de réalisations concrètes; là encore, c’est l’échange d’informations qui permettra d’être le plus proche de la réalité.

C’est tous ensemble, dans la plus grande transparence possible, sans chercher à nier une vérité inévitablement douloureuse, que l’on peut s’adapter au mieux.

Comment préparer l’avenir ?

Le projet pour l’année suivante doit être évoqué à chaque rencontre et réévalué au cours de l’année scolaire, en tenant compte de :
– la place de l’enfant dans le groupe et ses relations avec les autres élèves;
– son âge;
– ses acquis préscolaires.

Ce projet, peut être:

– un maintien dans une classe de même niveau si on pense que cela lui sera profitable;
– le passage dans la classe de niveau supérieur, en concertation avec l’enseignant de cette classe qui aura participé à une au moins des réunions de bilan;
– un moyen terme entre ces deux solutions: classe à double niveau, décloisonnement entre deux classes selon les périodes de la journée;
– le choix d’une autre pédagogie: CLIS (Classe d’intégration scolaire), ou établissement spécialisé si l’enfant ne tire manifestement aucun bénéfice de cette fréquentation de l’école ordinaire, s’il atteint un âge où le décalage avec les autres élèves risque de le mettre mal à l’aise et, surtout, s’il présente des signes de souffrance.

 

Des associations pour être accompagnés

Conclusion

L’intégration d’un enfant trisomique en école maternelle ne peut pas reposer uniquement sur la bonne volonté des adultes. Elle n’est pas un but en soi et il faut savoir repérer les enfants pour qui elle peut ne pas être bénéfique. Elle ne peut réussir que s’il s’établit un réel partenariat entre enseignants, parents et soignants, dans la plus grande clarté possible, en vue du mieuxêtre de l’enfant.

Pour en savoir plus
• Circulaires 2001-144 et 2002-111-112113. Bulletin officiel n° 19, du 09 mai 2002.
Guide Handiscol. Ministère de l’Éducation nationale, 110 rue de Grenelle Paris.

Circulaire de novembre 1999
« Chaque école, chaque collège, chaque lycée a vocation à accueillir, sans discrimination, les enfants et adolescents handicapés dont la famille demande l’intégration scolaire. Il ne sera dérogé à cette règle générale que si, après une étude détaillée de la situation, des difficultés importantes rendent objectivement cette intégration impossible ou trop exigeante pour l’élève. »

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